C’est une première en France. Une femme infertile de 34 ans a bénéficié d’une greffe d’utérus le 31 mars 2019 à l’hôpital Foch de Suresnes (Hauts-de-Seine). Cette greffe a été réalisée grâce à l’utérus de la mère de la receveuse. Le professeur Jean-Marc Ayoubi, chef de service de gynécologie obstétrique et médecine de la reproduction de l'hôpital Foch a assuré à l’AFP que la donneuse âgée de 57 ans et sa fille, dont les identités n’ont pas été dévoilées, se portaient bien.
Une double opération de 14 heures
Ce type de greffe est destiné aux femmes nées sans utérus ou à celles auxquelles cet organe a dû être retiré. Elle représente une alternative expérimentale à la gestation pour autrui (GPA) interdite en France à l’heure actuelle, ou à l'adoption. Dans le cas de la greffe réalisée par l’équipe du Pr Ayoubi, la receveuse était née sans utérus : elle était en effet atteinte du syndrome de Rokitansky, aussi appelé MRKH, une condition qui touche une femme sur 4.500.
Au total, la procédure complète a duré 14 heures pour les deux interventions, celle du prélèvement étant la plus longue. Le prélèvement doit en effet être très méticuleux pour que l'utérus soit réimplantable. L’équipe du Pr Ayoubi a eu recours à un robot chirurgical, qui offre une meilleure vision en 3D et qui facilite la dissection de vaisseaux très fins. La greffe a quant à elle été réalisée par chirurgie classique.
La grossesse prévue d’ici 10 mois
"La patiente transplantée n'est pas encore enceinte et le transfert d'embryons préalablement congelés pourrait se faire dans 10 mois", a précisé le Pr Ayoubi. Dans les autres cas internationaux, "cela s'est fait entre six et douze mois" a-t-il ajouté. Cette greffe n'a pas vocation à être permanente en raison du traitement antirejet. Il s'agit d'une "greffe provisoire" permettant d'avoir un enfant, rappelle-t-il. A sa connaissance, seules deux ou trois femmes dans le monde ont conservé l'utérus greffé pour mener une deuxième grossesse.
Déjà 15 naissances grâce aux greffes d’utérus dans le monde
La première naissance au monde après une greffe d'utérus a eu lieu en Suède en 2014. Depuis, une quinzaine de naissances ont été comptabilisées dans le monde : "neuf en Suède dont la dernière il y a quatre jours, deux aux Etats-Unis, une au Brésil, en Serbie, en Chine et en Inde", selon le professeur Mats Brännström, de l'université suédoise de Göteborg, contacté par l’AFP. Le plus souvent, les utérus transplantés sont issus de donneuses vivantes. Mais au Brésil, en décembre 2017, une naissance a eu lieu après la greffe d’un utérus de donneuse décédée.
L'équipe du professeur Ayoubi a reçu l'autorisation de l'Agence de la biomédecine et de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) de conduire un essai clinique pour 10 greffes avec donneuses vivantes apparentées. Une autre équipe au CHU de Limoges a de son côté eu l'aval pour huit greffes avec donneuses en état de mort cérébrale.