Pour la première fois en France, une femme de 34 ans, née sans utérus, a pu bénéficier d'une greffe, grâce à un don de sa mère, a annoncé ce jeudi l'hôpital Foch de Suresnes (Hauts-de-Seine). Cette première médicale française a eu lieu dimanche 31 mars. Explications sur cette incroyable opération.
L'influence suédoise. La Suède a inspiré les équipes françaises de l'hôpital de Suresnes (Hauts-de-Seine), qui viennent de réaliser la première greffe utérine dans l'Hexagone. « Nous sommes liés par un partenariat de dix ans avec la Suède », avait souligné le mois dernier le Pr Jean-Marc Ayoubi, chef du service de gynécologie-obstétrique et du centre de PMA de Foch, lors de journées consacrées à la procréation médicale assistée.
Le choix d'une donneuse vivante. Les équipes de Foch ont choisi la transplantation de l'utérus d'une donneuse vivante, contrairement au CHU de Limoges, le second établissement français autorisé à faire des greffes utérines, qui s'est orienté vers la sélection d'une donneuse décédée. Mais pour Foch, le choix du prélèvement de l'organe sur une femme en bonne santé a allongé la procédure administrative : il a fallu six ans pour obtenir les autorisations.
L'expertise de Foch. « Cet hôpital a une longue expérience de la greffe cardiaque, pulmonaire et rénale, rappelle le Pr Ayoubi. Et une maternité (2600 accouchements/an), un centre de PMA et une expérience des cancers pelviens et autres cancers féminins. » L'hôpital prend aussi en charge des patientes atteintes du syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (ou MRKH), qui touche 1 femme sur 4500 et se manifeste par une absence partielle ou totale du vagin et de l'utérus. Enfin, Foch a développé une expertise dans la chirurgie robotique appliquée à la gynécologie. La première greffe utérine de Foch a en effet été réalisée grâce à cette technologie, moins invasive et permettant de réduire le temps d'intervention pour la donneuse.
Une patiente rigoureusement sélectionnée. « Pour cette greffe, nous avons reçu 120 patientes, nous en avons sélectionné 20 puis retenu 5, indiquait le Pr Ayoubi trois semaines avant l'intervention, Comme en Suède, il s'agit d'un couple mère-fille. » Le chef de service de Foch avait précisé que l'âge limite pour la receveuse était de 36 ans « amendable à 38 ans ». Des examens médicaux préalables étaient évidemment nécessaires pour protéger les patientes. « Il n'est pas question de transmettre une maladie à la receveuse », note le Pr Ayoubi. Et il fallait s'assurer notamment de la qualité de l'endomètre - la muqueuse utérine - de la mère.
Une intervention lourde. La première intervention, l'ablation de l'utérus de la donneuse, a été la plus lourde et la plus longue. Mais Foch l'avait déjà expérimentée à plusieurs reprises, avait assuré le Pr Ayoubi : « Nous avons déjà pratiqué des hystérectomies par cœlioscopie robot assistée. La chirurgie robotique, pour cette première greffe, permet de passer de 10 heures d'intervention pour la donneuse, à 6 ou 7 heures, avec des pertes de sang moins importantes. » Une opération très délicate puisqu'il s'agit de séparer les parois utérines des vaisseaux sanguins. La seconde opération, la transplantation de l'utérus sur la receveuse, dure entre 3 et 4 heures. La donneuse de 57 ans et sa fille, 34 ans, « vont bien », a assuré ce jeudi le chirurgien de Foch. Le transfert d'embryons, qui ont été préalablement congelés, pourrait se faire dans dix mois.